Ce roman prend racine en 1919, dans le Berry profond. Jacques Morlac, héros de la Grande Guerre est l'unique prisonnier d'une caserne. Hugues Lantier du Grez, chef d'escadron et juge militaire vient l'auditionner. A son arrivée, le juge découvre un chien qui aboie jour et nuit... Cette histoire est bâtie autour d'un triptyque : un gradé aux principes qui vacillent, un soldat qui a découvert les horreurs de la guerre et est devenu un héros et une femme usée par le travail de la terre et la solitude. Pour venir souder ces trois personnages, il y a un chien : Guillaume. C'est, à mon sens, la pierre angulaire de ce roman. C'est sur la faible échine de Guillaume que repose la clé du drame. Guillaume est un chien et il porte les stigmates des années de guerre vécues au coté de son maître. Il est touchant dans sa fidélité, son dévouement, son humanité. "Quand le chien eut terminé de s'abreuver, le juge s'assit sur un banc près de la fontaine, dans la même ombre. Il se demandait si Guillaume allait revenir sur la place et reprendre ses aboiements. Mais, au contraire, il resta posté devant le banc, les yeux fixés sur l'officier. |
En dépit de son côté très "humain", Guillaume n'en est pas moins un animal qui réagit comme un animal, à l'instinct et avec fidélité. En agissant comme tel, Guillaume va déclencher un drame qui est la clé de ce livre et qui va bouleverser la vie de Morlac...
"C'était lui, le héros. C'est ça que j'ai pensé, voyez-vous. Pas seulement parce qu'il m'avait suivi au front et qu'il avait été blessé. Non, c'était plus profond, plus radical. Il avait toutes les qualités qu'on attendait d'un soldat. Il était loyal jusqu'à la mort, courageux, sans pitié envers les ennemis. Pour lui, le monde était fait de bons et de méchants. Il y avait un mot pour dire ça : il n'avait aucune humanité. Bien sûr, c'était un chien... Mais nous qui n'étions pas des chiens, on nous demandait la même chose. Les distinctions, médailles, citations, avancements, tout cela était fait pour récompenser des actes de bêtes." Pages 121
De plus, de roman est un très bel hommage que rend Jean-Christophe Rufin, au photographe Benoît Gysembergh avec lequel il a couvert des reportages en Jordanie. En effet, au cours de leur pérégrination, le photographe lui a confié une anecdote de son grand-père revenu héros de la Grande Guerre, décoré de la Légion d'Honneur. Il n'en fallait pas plus pour que germe dans l'esprit de ce romancier cet édifice romanesque.
S'il est un livre à côté duquel il n'est pas permis de faire l'impasse c'est bien "Le collier rouge" !
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