dimanche 2 août 2015

Chut on nous écoute... "Le roman de l'espionnage"

Cela faisait longtemps que "Le roman de l'espionnage" de Vladimir Fédorovski dormait paisiblement sur mes étagères. C'était le moment de lui secouer les pages ! On remonte les années, on revient au temps des barbouzes, de la "Belle-Epoque des illégaux", avec la communauté des russes de Paris, Sorge virtuose de l'orchestre rouge, puis un p'tit tour au Caire, Samarkand, les traités, l'affaire Farewell, la perestroïka et la chute du Mur. C'est un bien sombre voyage auquel nous invite Vladimir Fédorovski...

Drôle de vie que celle des espions. Après avoir rendus de bons et loyaux services (valait mieux, sinon c'était l'exécution directe !), les serviteurs soviétiques étaient contraints à changer d'identité.
"Il m'est arrivé autrefois de porter barbe et moustache, convint Dimitri.
Vous n'y êtes pas : vous allez changer de visage. Tout est prêt pour une intervention chirurgicale. Vous verrez, nous faisons des miracles. Dimitri accepta. (Page 59)

Quelques années après il croise une ancienne connaissance...

Sous le masque absurde qu'on lui avait modelé contre son gré, Marie avait retrouvé en trois coups de crayon tout ce dont il était autrefois si fier : les pommettes affaires, les joues creuses, l'arc du nez, et surtout ses yeux. "Tes yeux au moins ne changeront pas", avait pressenti Léna...
"Dimitri, c'est bien toi ?", interrogea Marie dans un murmure, ses grands yeux bleus fouillant derrière le visage inconnu pour y retrouver les traits de l'ami de toujours.
Il acquiesça, incapable de proférer une parole.
Quand enfin il fut à même de parler, assis à ses pieds, sans la regarder, il se livra pendant plus d'une heure. Une confession minutieuse, complété, que Marie écouta, horrifiée. L'aveu d'un agent secret aguerri. (Page 65)
Livre paru au Livre de Poche

Ce livre brasse un grand vent d'histoires et ouvre sur une belle galerie de portraits..

Mikhaïl Koltsov, ami avec Elsa Triolet et Aragon, "correspondant de presse" pas comme les autres devint également le conseiller politique du gouvernement espagnol et son consultant en matière d'aviation. Ernest Hemingway l'introduisait quant à lui sous le pseudonyme de "Karkov" dans son roman "Pour qui sonne le glas". (page 72)

Dans ces affaires d'espionnage, les tragédies tournent souvent à l'opéra bouffe et les drames se griment en opérette. En octobre 1942, le dictateur rouge écrivit  à son ambassadeur à Londres : "A Moscou, nous avons tous l'impression que Churchill vise la défaite de l'URSS POUR POUVOIR PACTISER Avec l'Allemagne de Hitler aux dépens de notre pays". !! (page 104)

Il ne s'agit pas d'un ouvrage précis d'histoire mais bien d'un roman relatant d'une manière très vivante et agréable des faits historiques et faisant découvrir des personnages méconnus.